Abstract
contexte: La noyade est responsable de centaines de décès évitables au Canada chaque année, mais l’incidence des maladies préexistantes sur le risque de décès par noyade est inconnu. Nous avons voulu décrire la prévalence des maladies préexistantes chez les personnes victimes de noyade au Canada et évaluer le risque de noyade chez les personnes présentant des maladies préexistantes courantes.
Méthodes: Nous avons passé en revue toutes les noyades accidentelles survenues au Canada (2007–2016) et recensées dans la base de données du Centre canadien de recherche sur la prévention de la noyade. Pour chaque noyade, nous avons établi si la personne souffrait de maladies préexistantes et si ces maladies avaient contribué à la noyade. Nous avons calculé le risque relatif (RR) de noyade stratifié selon l’âge et le sexe pour chaque maladie préexistante à l’aide de la base de données du Système canadien de surveillance des maladies chroniques.
Résultats: Durant la période de 2007 à 2016, 4288 personnes ont été victimes de noyade accidentelle au Canada et le tiers d’entre elles souffraient de maladies préexistantes. Une maladie préexistante a contribué à la noyade dans 43,6 % (n = 616) des cas. La noyade est survenue plus souvent chez les personnes atteintes de cardiopathie ischémique (RR 2,7, intervalle de confiance [IC] de 95 % 2,5–3,0) et de trouble convulsif (RR 6,3, IC de 95 % 5,4–7,3), mais moins fréquemment chez les personnes atteintes de maladie respiratoire (RR 0,12, IC de 95 % 0,10–0,15). Les femmes de 20–34 ans souffrant d’un trouble convulsif étaient 23 fois plus à risque que la cohorte assortis selon l’âge et le sexe (RR 23, IC de 95 % 14–39). En général, parmi les personnes qui présentaient des maladies préexistantes, la noyade est survenue le plus souvent dans une baignoire (RR 5,9, IC de 95 % 4,8–7,0) ou chez des personnes seules (RR 1,99, IC de 95 % 1,32–2,97) et moins souvent chez les hommes (RR 0,92, IC de 95 % 0,88–0,95) et les personnes ayant consommé de l’alcool (RR 0,72, IC de 95 % 0,65–0,80).
Interprétation: Le risque de noyade est plus élevé en présence de certaines maladies préexistantes. Il faut élaborer des stratégies de prévention de la noyade adaptées à certaines maladies préexistantes et catégories d’âge. Les stratégies de prévention initiales devraient mettre l’accent sur les troubles convulsifs et les noyades qui surviennent dans la baignoire.
La noyade est une importante cause de décès au Canada et certains aspects de son épidémiologie ont été caractérisés1,2. Le fait d’identifier et de corriger les facteurs de risque de noyade permettrait de sauver des vies. Par exemple, après qu’une recherche ait montré qu’une proportion considérable de noyades chez les enfants survenait dans des piscines résidentielles non sécurisées et que la pose de clôtures en réduisait efficacement le nombre, des changements ont été apportés à la réglementation au Québec3–5.
Les études sur les facteurs de risque s’attardent souvent aux éléments environnementaux ou comportementaux modifiables (p. ex., sièges de bain pour bébés, surveillance, consommation d’alcool et de drogues)6–11, peu de recherches ont porté sur le lien entre les problèmes de santé préexistants et le risque de noyade.
Les études qui ont analysé le lien entre les problèmes de santé préexistants et la noyade sont limitées par la taille réduite de leurs échantillons et l’accent placé sur certaines maladies (p. ex., trouble du spectre de l’autisme, épilepsie) ou catégories d’âge (p. ex., enfants)12–17. Le lien entre diverses maladies préexistantes et la noyade dans différents groupes d’âge est mal compris. Cette information faciliterait l’élaboration de stratégies ciblées de prévention de la noyade et l’allocation des ressources selon un ordre de priorité.
Chez les adultes canadiens, 44 % souffrent d’au moins 1 maladie chronique; on en déduit que des millions de Canadiens et Canadiennes souffrant de maladie cardiaque, respiratoire ou neurocognitive s’adonnent à des activités aquatiques18. En outre, la natation et l’aquaforme sont souvent préconisées chez les personnes qui souffrent de maladies chroniques comme mesures de promotion de la santé19,20. Le public et les médecins doivent toutefois être conscients que certaines maladies préexistantes peuvent exposer les gens à un risque plus élevé de noyade, et que des précautions appropriées s’imposent pour assurer leur sécurité s’ils s’adonnent à des activités aquatiques.
Nous avons voulu décrire les problèmes de santé préexistants par catégorie d’âge chez les personnes ayant succombé à la noyade au Canada et évaluer le risque de noyade chez les personnes qui présentent des maladies courantes afin de guider les interventions futures en matière de santé publique.
Méthodes
Nous avons analysé rétrospectivement toutes les noyades accidentelles survenues au Canada de janvier 2007 à décembre 2016 inclusivement.
Sources des données
Nous avons interrogé la base de données du Centre canadien de recherche sur la prévention de la noyade (CCRPN) pour recenser le nombre de décès par noyade.
Le CCRPN recense tous les décès accidentels par noyade au Canada dans une base de données anonymisée21. En résumé, la base de données est alimentée par les bureaux des coroners et médecins légistes en chef des provinces et des territoires et un processus de révision structuré des rapports qu’ils produisent. Les sources de données courantes sont notamment les dossiers d’enquête des coroners, les dossiers des services policiers et des hôpitaux, les rapports de toxicologie et d’autopsie, de même que les certificats de décès. La qualité des données est vérifiée par des gestionnaires de projets, un coroner qui agit à titre d’expertconseil et un épidémiologiste. L’outil de collecte des données structurée est régulièrement évalué sur le plan de la validité apparente, et des mises à jour sont apportées au besoin22. Les maladies chroniques recensées dans la base de données sont considérées présentes chez les victimes de noyade quand elles correspondent aux définitions fournies à l’annexe 1, accessible en anglais au www.cmaj.ca/lookup/doi/10.1503/cmaj.211739/tab-related-content. La plupart des dossiers du CCRPN ajoutent des détails au sujet des maladies préexistantes dans un résumé en texte libre.
Nous avons consulté le Système national de surveillance des maladies chroniques (SNSMC) pour obtenir la prévalence et les données populationnelles relatives à l’asthme, la maladie pulmonaire obstructive chronique (MPOC), la démence, l’épilepsie et la cardiopathie ischémique23. Le SNSMC est appuyé par l’Agence de la santé publique du Canada (ASPC) et recense les données concernant tous les individus inscrits aux régimes d’assurance maladie des provinces ou des territoires (environ 97 % de la population canadienne). Il rapporte les maladies chroniques en reliant les données personnelles aux rapports de congés hospitaliers, aux données de facturation des médecins et aux codes des diagnostics de la 9e ou 10e révision de la publication intitulée Classification internationale des maladies. On peut trouver les définitions du SNSMC en ligne23.
Nous avons regroupé les données pour l’asthme et la MPOC et utilisé leur prévalence combinée comme valeur substitut pour les maladies respiratoires au Canada (elles représentent 99,2 % des maladies respiratoires chroniques au Canada)24. La cardiopathie ischémique, l’épilepsie et la démence concordaient bien avec les définitions du CCRPN.
Extraction des données
Nous avons extrait l’âge, le sexe, les maladies chroniques, les conclusions des rapports d’autopsie, les facteurs ayant contribué à la noyade, la province et la densité de population (urbaine ou rurale) là où les noyades sont survenues, le type d’accompagnement (le cas échéant), le type de plan d’eau, ainsi que la consommation d’alcool et le type d’activité ayant précédé chaque cas de noyade recensé par le CCRPN. Un résumé de l’incident était également fourni.
Les catégories d’âge étaient les suivantes: jeunes enfants (âge < 5 ans), enfants (5–19 ans), jeunes adultes (20–34 ans), adultes (35–64 ans) et adultes âgés (≥ 65 ans). Les catégories d’activité ayant précédé la noyade incluaient: activité aquatique, bain, navigation de plaisance, activité non aquatique et transport (p. ex., motoneige). Les activités aquatiques incluaient celles qui font que la personne se trouve naturellement dans l’eau, tandis que les activités non aquatiques incluaient celles où la personne pouvait se trouver à proximité de l’eau, sans avoir l’intention d’y entrer, par exemple, lors d’une chute accidentelle. Les définitions utilisées pour les variables sont incluses à l’annexe 1.
Une chercheuse (J.S.) a encodé les problèmes de santé préexistants de chaque victime de noyade selon 6 catégories: maladie cardiovasculaire, maladie respiratoire, trouble convulsif, handicap physique, trouble neurocognitif et autres. Un second chercheur (C.L.D.) a vérifié l’exactitude de tous les cas. Les disparités étaient résolues par voie de discussion.
Nous avons passé en revue chaque dossier pour déterminer si une maladie préexistante avait pu contribuer à la noyade. C’était le cas quand le coroner avait identifié la maladie dans le cadre de son examen ou si 2 des chercheurs convenaient chacun de leur côté que selon le résumé de l’incident, il y avait une forte probabilité que la maladie préexistante ait joué un rôle important. Nous avons utilisé les critères définis par Franklin et coll.12 pour déterminer le degré de contribution de la maladie (cause directe, cause ayant nui au sauvetage et à la réanimation ou cause liée aux circonstances de la noyade).
Analyse statistique
Nous avons utilisé le logiciel STATA pour effectuer toutes les analyses statistiques. Nous avons calculé les rapports de cotes pour les caractéristiques de la noyade chez les personnes présentant une maladie préexistante au moyen de la régression logistique en procédant à des ajustements pour tenir compte de l’âge, et nous les avons convertis en risques relatifs (RR) avec des intervalles de confiance (IC) de 95 % selon la prévalence de base25.
Nous avons calculé les RR de noyade avec IC de 95 % en fonction des maladies préexistantes spécifiques. Nous avons comparé la prévalence des maladies préexistantes chez les victimes de noyade à celle de la population canadienne générale au cours de la même période (annexe 2, accessible en anglais au www.cmaj.ca/lookup/doi/10.1503/cmaj.211739/tab-related-content, pour les formules de calcul). D’autres études sur la noyade ont utilisé cette méthode dans le passé12,17.
Approbation éthique
Cette étude a été approuvée par le Comité d’éthique de la recherche en santé de l’Alberta (HREBA.CHC-20-0023).
Résultats
De 2007 à 2016, 4288 personnes ont perdu la vie lors d’une noyade accidentelle au Canada. L’âge médian des victimes était de 44 ans (écart interquartile [ÉI] 25–60 ans) et la majorité (80,5 %) était des hommes (tableau 1). Environ les deux tiers (62,9 %) des noyades sont survenus en milieu urbain. Nous avons constaté qu’une activité aquatique (n = 1091, 25,4 %) et la navigation de plaisance (n = 1009, 23,5 %) étaient les activités précédentes les plus fréquentes, et le plus souvent, les noyades sont survenues dans des lacs ou des étangs (n = 1550, 36,1 %).
Parmi les victimes de noyade, nous avons identifié 1412 personnes (32,9 %) souffrant de maladies préexistantes. Les maladies préexistantes les plus prévalentes étaient: maladie cardiovasculaire (53,7 %), handicap physique (16,3 %) et trouble convulsif (13,7 %) (tableau 2). Parmi les victimes, 484 personnes (34,3 %) souffraient d’une maladie préexistante qui ne cadrait dans aucune catégorie préspécifiée (annexe 3, accessible en anglais au www.cmaj.ca/lookup/doi/10.1503/cmaj.211739/tab-related-content). Parmi les personnes souffrant de maladies préexistantes, 395 (27,9 %) en présentaient plus d’une.
Nous avons constaté que la majorité des noyades sont survenues lorsque la victime se trouvait seule ou sans témoins (63,3 %–84,4 %). Les personnes atteintes de maladie cardiovasculaire (36,1 %), de maladie respiratoire (33,7 %) et de handicap physique (27,8 %) se sont le plus souvent noyées dans des lacs et des étangs. Les personnes souffrant de trouble convulsif (52,6 %) ou neurocognitif (28,1 %) se sont le plus souvent noyées dans la baignoire. Nous avons identifié une maladie préexistante comme facteur contributif à la noyade dans 616 cas (43,6 %) (annexe 4, accessible en anglais au www.cmaj.ca/lookup/doi/10.1503/cmaj.211739/tab-related-content).
La figure 1 montre la proportion (stratifiée par catégorie d’âge) des victimes de noyade atteintes de problèmes de santé préexistants identifiés comme facteurs contributifs potentiels. Les risques de noyade chez les personnes souffrant de cardiopathie ischémique, de maladie respiratoire, de trouble convulsif et de trouble neurocognitif préexistants stratifiés selon l’âge et le sexe sont présentés au tableau 3. Le risque relatif de noyade chez les personnes atteintes de cardiopathie ischémique, de maladie respiratoire et de trouble convulsif stratifié selon l’âge est présenté à la figure 2. Nous avons constaté que la cardiopathie ischémique (RR 2,7, IC de 95 % 2,50–3,00) et le trouble convulsif (RR 6,2, IC de 95 % 5,40–7,30) étaient associés à un risque accru de noyade. Parmi les personnes atteintes de cardiopathie ischémique, nous avons observé un risque accru chez les adultes de tous âges, à l’exception des femmes de 20–34 ans (RR 3,4, IC de 95 % 0,48–24,00). Chez les personnes souffrant de trouble convulsif, on a observé une augmentation significative du risque de noyade dans toutes les catégories d’âge et de sexe; le risque le plus marqué a été observé chez les femmes de 20–34 ans (le risque était 23 fois plus élevé que dans la population générale: RR 23, IC de 95 % 14,00–39,00). La maladie respiratoire a été associée à une baisse du risque de noyade dans toutes les catégories d’âge et de sexe.
Interprétation
Au Canada, la population bénéficie de messages de santé publique, de programmes de formation en sauvetage et de réglementations qui visent à réduire le risque de noyade accidentelle. Malgré ces mesures préventives, certains groupes sont plus à risque. Plus de 400 noyades surviennent chaque année au Canada et la noyade est l’une des principales causes accidentelles de décès26. Nous avons observé un taux élevé de maladies préexistantes chez les personnes victimes de noyade accidentelle et des risques relatifs de noyade élevés chez les personnes souffrant de certaines maladies préexistantes. Dans l’ensemble, la noyade contribue au deuxième plus lourd fardeau d’années potentielles de vie perdues dues aux accidents27.
Les interventions en prévention de la noyade devraient être adaptées aux différents groupes à risque.
Dans une étude de 1993, 5 % des noyades en Alberta avaient été jugées en lien direct avec des épisodes convulsifs: 60 % étaient survenues dans la baignoire et 83 % des victimes présentaient des taux subthérapeutiques de leurs anticonvulsivants16. Dans notre étude, 13,7 % des personnes souffraient d’un trouble convulsif et 52,6 % des décès sont survenus dans la baignoire. Nous avons été incapables d’évaluer les taux d’anticonvulsivants, mais la proportion élevée de noyades associées à des états convulsifs rappelle la nécessité d’une bonne observance thérapeutique avant toute immersion dans l’eau. Deux études sur des enfants ont mentionné un risque accru de noyade associé à un trouble convulsif chez cette population12,28. Notre étude confirme ces observations. Ce sont les jeunes femmes atteintes d’un trouble convulsif qui présentaient le risque le plus élevé de noyade, tous âges, sexes et maladies préexistantes confondus.
On dispose de peu de données probantes sur les meilleures interventions pour protéger les personnes atteintes d’un trouble convulsif lors des activités récréatives ou quotidiennes, comme le bain. Les recommandations incluent: utiliser la douche plutôt que la baignoire, et sous la surveillance ou la vigilance d’une personne à proximité; participer à des activités aquatiques dans une piscine où il y a de la surveillance ou se faire accompagner lors d’activités en eau libre; et toujours porter une veste de flottaison bien ajustée lors d’activités en eau libre28,29. Étant donné qu’il est impossible de prévenir entièrement les épisodes convulsifs chez la personne qui se trouve dans l’eau16, ces précautions doivent s’appliquer la vie durant.
Les noyades dans les baignoires sont fréquentes chez les personnes atteintes d’un trouble convulsif, ou de la plupart des autres maladies préexistantes. Cela pourrait être une première cible importante des messages de la santé publique puisque cela concerne aussi les autres problèmes de santé, et qu’un plan de prévention est plus facile à appliquer dans une salle de bain que dans d’autres environnements.
La maladie cardiovasculaire était présente dans plus de la moitié des décès par noyade chez les personnes qui souffraient d’une maladie préexistante. À notre connaissance, aucune étude n’a mesuré le risque de noyade chez les personnes souffrant de maladie cardiovasculaire; toutefois, plusieurs études ont observé sa prévalence élevée chez les personnes victimes de noyade, surtout chez les adultes âgés15,30,31. Nous avons constaté que les jeunes adultes souffrant de cardiopathie ischémique étaient exposés à un risque relatif plus élevé de noyade que les adultes âgés. On s’explique mal ce phénomène et la recherche doit se poursuivre puisque la cardiopathie ischémique est en hausse chez les jeunes adultes32.
Les personnes atteintes de cardiopathie ischémique ne devraient pas éviter les activités aquatiques car plusieurs études ont montré une amélioration de leur santé et de leur qualité de vie lorsqu’elles adoptent une activité aquatique comme exercice de mise en forme ou de réadaptation33–36. Les personnes souffrant de maladie cardiovasculaire devraient plutôt discuter avec un professionnel de la santé avant d’opter pour une activité aquatique, en augmenter l’intensité graduellement, porter une veste de flottaison et y participer dans un environnement supervisé ou avec un accompagnateur au fait de leur état de santé.
Nous avons constaté que les personnes atteintes de maladie respiratoire étaient exposées à un risque moindre de noyade, peu importe l’âge. Un effet similaire chez les enfants asthmatiques a été observé12. Cela est surprenant, car les activités aquatiques peuvent être un déclencheur physique des symptômes respiratoires et plusieurs personnes porteuses de tels diagnostics ont moins de réserves physiologiques lorsqu’elles sont submergées ou immergées dans l’eau. Selon une hypothèse, la baisse du risque est due au fait que les personnes atteintes de maladie respiratoire sont plus conscientes des dangers potentiels de l’eau12. Par conséquent, elles peuvent appliquer une plus grande prudence (voire éviter de s’exposer) pour prévenir un accident. Cela pourrait s’étendre aux personnes atteintes d’un trouble neurocognitif ou d’un handicap physique et est appuyé par une étude australienne sur la noyade chez les personnes atteintes d’un trouble du spectre de l’autisme17. Toutefois, on ignore pourquoi cette hypothèse s’appliquerait seulement à certaines maladies préexistantes et non à d’autres, comme la maladie cardiaque et les troubles convulsifs. Des études sur les croyances des patients atteints de différentes maladies préexistantes au sujet de leur participation à des activités aquatiques nous permettraient de mieux comprendre le phénomène.
Plusieurs facteurs de risque de noyade ont déjà fait l’objet d’études, entre autres la consommation d’alcool37. Étonnamment, nous avons constaté que cette dernière était associée à une baisse du risque de noyade (RR 0,72, IC de 95 % 0,65–0,80) chez les personnes souffrant de maladies préexistantes, comparativement aux personnes n’en ayant pas consommé. Il est peu probable que cet effet puisse s’expliquer du fait que les personnes qui souffrent de maladies préexistantes consomment moins lors d’activités aquatiques que celles qui n’ont pas de maladies préexistantes. Il faudra approfondir la recherche pour analyser le lien entre ces 2 facteurs de risque.
Limites de l’étude
Les données de cette étude avaient déjà été recueillies et les détails au sujet des maladies préexistantes étaient limités dans certains cas. Nous n’avons pas pu ajuster notre analyse pour tenir compte de variables de confusion potentielles, sauf l’âge et le sexe des victimes (p. ex., consommation d’alcool ou présence/absence de témoins). Les données du Système canadien de surveillance des maladies chroniques n’incluent pas les patients qui n’utilisent pas les services de santé et les patients de médecins qui n’utilisent pas les codes de facturation. Cela pourrait mener à une sous-estimation de la prévalence des maladies chroniques chez la population canadienne et par conséquent, à une légère sous-estimation du risque. Dans l’ensemble, en raison des variables de confusion non mesurées, il faut axer l’interprétation des résultats sur le risque et interpréter les valeurs spécifiques avec prudence.
Certaines variables fournies par le CCRPN (p. ex., activité ou consommation d’alcool précédant la noyade) sont sujettes à un biais d’information puisque les coroners et les services policiers ne sont pas témoins des noyades. Nous croyons que l’incidence de ce biais est légère, puisque la confirmation de l’issue et de la plupart des expositions se fondent sur des observations objectives.
Nous n’avions pas de données sur les noyades avec issue non fatale (personnes réanimées à la suite d’une insuffisance respiratoire résultant d’une immersion sous l’eau) et nous n’avons pas pu comparer le lien entre les maladies préexistantes et les noyades fatales et non fatales. Les problèmes de santé mentale n’étaient pas consignés de manière constante dans le CCRPN et n’ont pas pu être inclus dans notre analyse. D’autres recherches devraient explorer le lien entre les problèmes de santé mentale et la noyade.
Nous avons utilisé une méthode décrite précédemment12 pour déterminer si le problème de santé préexistant avait contribué directement à la noyade. Toutefois, cette méthode n’a pas été validée à l’externe et sous-estime probablement l’incidence totale des maladies préexistantes sur les noyades en raison de leur rôle indirect, qui n’est pas pris en compte par la méthode. Finalement, le lien entre l’effet combiné de plusieurs comorbidités préexistantes et la noyade n’a pas pu être évalué.
Conclusion
Environ le tiers des victimes de noyade accidentelle au Canada entre 2007 et 2016 souffraient d’un problème de santé préexistant, et chez au moins la moitié d’entre elles, le problème de santé préexistant a directement contribué à la noyade. Il faut élaborer des stratégies préventives spécifiquement adaptées à certaines maladies et catégories d’âge. Les interventions initiales en matière de santé publique devraient s’intéresser aux personnes atteintes d’un trouble convulsif et à leur sécurité dans les activités de la vie courante (p. ex., le bain), puisqu’elles sont étroitement liées à un risque accru de noyade.
Remerciements
Les auteurs remercient le Centre canadien de recherche sur la prévention de la noyade pour les données sur les noyades utilisées dans cette étude.
Footnotes
Intérêts concurrents: Aucun intérêt concurrent n’a été déclaré.
Cet article a été évalué par des pairs.
Collaborateurs: Tous les auteurs ont analysé les données, rédigé l’ébauche de l’article, et en ont révisé de façon critique le contenu intellectuel important; ils ont donné leur approbation finale pour la version destinée à être publiée et assument l’entière responsabilité de tous les aspects du travail.
Partage de données: Les données utilisées pour cette étude proviennent des bureaux des coroners et des médecins légistes et ne sont pas accessibles au public en raison de leur nature délicate. Par conséquent, l’ensemble de données à l’appui des conclusions de cette étude ne peut être partagé à moins que la personne n’ait obtenu l’approbation éthique, conformément aux dispositions des accords conclus avec chacun des bureaux des coroners et des médecins légistes en chef des provinces et des territoires pour la recherche. Les demandes d’accès aux données peuvent être adressées à experts{at}drowningresearch.ca.
- Accepted April 4, 2022.
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